Resume Quatre Soldats Mingarelli



































QUATRE SOLDATS
Hubert Mingarelli
Edité en France aux Editions du Seuil en Janvier 2003

Couverture Quatre Soldats

Un écrivain dans sa montagne

 

L'épure de l'écriture des romans de Mingarelli me fait penser aux estampes japonaises. Très peu de mots, pas de couleurs vives, et beaucoup de délicatesse.

"Quatre soldats" se passe lors de la première guerre mondiale, en 1919. C'est l'hiver, il fait rudement froid, et les compagnies de l'armée russe se réfugient dans les bois avant que reprennent les batailles, au printemps. Là, quatre hommes vont créer une petite cellule de chaleur, de soutien, d'amitié. Comme un temps suspendu dans leur destin de soldats. Pour repousser ou oublier la mort qui les attend presque à coup sûr, ils tissent pendant quelques mois des liens fraternels. Le hasard, presque, les a rassemblés. Il y a Pavel, un peu plus culotté et débrouillard que les autres. Quand il faut prendre une décision, ou qu'on a besoin d'explications, c'est Pavel qu'on interroge du regard. Il y a Kyabine. Très grand, très fort, et très naïf. On le taquine pour le plaisir d'entendre sa voix de tonnerre. Il y a Sifra, c'est le plus jeune et le plus doux de tous, il ne dit pas grand chose, mais son regard est bon, attentif. Et le dernier c'est Evdodkim, il doit avoir 17 ans tout au plus, et il devient vite "le gosse Evdokim".

Ils apprennent à compter les uns sur les autres. Dans la cabane puis dans la tente, au milieu desquelles brûle un poêle savamment installé (il ne s'agit pas de se réveiller dans une cabane en feu) qui réchauffe leurs nuits glaciales, ils partagent les parties de dé, les couvertures, les nuits où certains font des cauchemards et comptent pour se rassurer sur la silencieuse présence des autres.

Il y a aussi les cigarettes qu'ils parient ou échangent contre une corvée. Le thé, moment intense, si rare qu'on le garde en bouche jusqu'à ce qu'il tiédisse avant de l'avaler, pour prolonger le plus longtemps possible le réconfort qu'il apporte.
Quelques rites viennent illuminer le quotidien, et leur donner un semblant d'espoir. Une montre qu'ils portent contre eux, à tour de rôle, objet doublement précieux parce qu'il contient à l'intérieur la photo d'une belle inconnue qu'ils embrassent passionnément avant de s'endormir, pour qu'elle porte chance.
L'étang, découvert lors d'une ballade, qui offre chaque jour un havre de paix préservé, comme en dehors du monde. Là, c'est le repos, des baignades, quelques rires
... l'attente et l'angoisse de la mort estompées grâce à l'échange, à l'amitié lumineuse.

Aux trois premiers hommes est venu se joindre Evdokim, le plus jeune, qui note sur un carnet "ce qu'il voit". Les trois autres, qui ne savent pas écrire, restent autour de lui, lorsqu'il écrit dans son carnet. Ils réclament au jeune soldat de raconter ce qu'ils ont fait, ce qu'ils ont vécu, rien ne doit être oublié, tout doit être consigné, chaque après midi de pêche au soleil, chaque partie de dé. Chacun de leurs derniers souvenirs lumineux.