L'ange sur le toit



































L' Ange sur le Toit

Russel Banks

Russel Banks

Une lecture de Jean-Christophe

Banks revient aux textes courts pour nous raconter des fragments d'existences chamboulées, des liens rompus et nous donner des nouvelles de son pays.  Comment fait-il pour toujours rester pudique sans jamais basculer dans l'obscénité ?
Spontanément, des mots s'imposent : décence, délicatesse, générosité, compassion...
Qui ne sont bien sûr, qu'un embryon de réponse.

Comme dans tous les livres de Banks, on retrouve le refus du pathos et le recours à l'humour contre le sentimentalisme. Si le rapport entre l'auteur et ses personnages est une affaire de focale alors Banks trouve toujours la justedistance. Il ne les prend pas de haut, il ne les regarde pas comme des bêtes curieuses, il ne maltraite personne, le petit figurant conserve sa dignité. Les personnages ne sont jamais ramenés à un stéréotype, il leur accorde le droit d'exister au delà du comportement qu'ils peuvent avoir au moment où il raconte le récit.

En gros il remet sur le tapis l'éternelle vieille question "  Suis-je un salaud (ou un lâche, ou un tricheur etc.)  parce qu'à un moment donné je me conduis comme un salaud ? " et prend clairement  partie : non. Comme chez tous les grands écrivains, ce qui n'est pas dit est au moins  aussi important que ce qui est raconté. Banks est ce scientifique capable de saisir le  big bang de la conscience, ce moment infime, un dixième de seconde, pendant lequel  notre univers explose, d'autant plus violent et douloureux qu'il est fugitif et que l'onde de choc va conditionner le reste de notre existence. Là ou d'autres se posent en procureur, il accorde le bénéfice du doute à ses personnages.

C'est impossible de ne pas aimer cet homme là.

Jean-Christophe M.

Des histoires de liens, dans ce livre de Banks, il n'y a que ça. Des liens qui se défont bien sûr, des souvenirs de liens dont on s'aperçoit avec amertume, vingt ans trop tard à quel point ils étaient importants, après qu'on les ait laissés s'effilocher. Des liens qu'on croit solides et qui ne sont dûs qu'à l'habitude, des liens qui se rompent avec fracas et d'autres qui se défont sans faire de bruit, et des liens fragiles qui se créent de façon improbable, inattendue.

L'une des phrases du livre qui pourrait définir l'ambiance générale des nouvelles : << Mais la vie familiale lui avait glissé des mains sans qu'il le remarque, comme si, en fermant les yeux pour boire à une source, il avait perdu l'eau dans le creux de sa main et n'avait pu ensuite imaginer un moyen pour la récupérer. La source avait dû se tarir. Un homme ne peut quand même pas accuser ses mains, pas vrai ?>>

Chaque fois qu'un homme -souvent, les héros de ces nouvelles sont des hommes vieillissants, autour de 50 ans - regarde en arrière, c'est pour s'apercevoir que finalement, sa vie est faite en grande partie de regrets.

 

C.J.

Extrait

L'ange sur le toit chez ACTES SUD

En continuant de sourire, elle m'adresse un lent geste d'adieu, comme si elle me repoussait de la main, me congédiait, et elle rentre. Une fois la porte refermée sur elle, j'ai envie de rester là tout seul sur les marches, d'y passer la nuit en laissant la neige tomber en nuages autour de ma tête et en la regardant recouvrir nos traces sur le sentier. Mais il est réellement tard, et comme je dois travailler le lendemain, je m'en vais.

Dans ma voiture, en rentrant chez moi, je fais tout mon possible pour ne pas pleurer. Le temps est venu, le temps est passé, le temps ne reviendra jamais, voilà ce que je me dis. Et je conclus que ce qui est devant moi, là, c'est tout ce que j'ai. Mais, en conduisant ma voiture à travers les rafales de neige, ce qui est devant moi ne me paraît pas grand-chose, à part les gentillesses que je viens d'échanger avec une vieille dame, et c'est donc là-dessus que je me concentre.

Un article sur l'oeuvre de Russel Banks
sur le site Chronic'art

Il existe donc un monde selon Banks. Un monde dur, froid, géographiquement situé, à la frontière avec le Canada, quelque part entre le New Hampshire et le massif des Adirondacks. Un microcosme où se déroulent les drames ordinaires de communautés ordinaires et exemplaires. Toute société humaine possède son meurtrier en série. Toute communauté peut être balayée par la fatalité d'un banal accident d'autocar. Tout être peut basculer dans la violence et la délinquance. Les romans de Russell Banks fouillent ces zones d'ombre qui se trouvent entre l'acte volontaire et irréparable et la fatalité. Ils en dressent la cartographie détaillée, dans laquelle les choses, les êtres et la nature ont leur place, et participent au désastre. Ils sondent, enfin, l'ambiguïté extrême de la morale pour en déduire des vérités sur les hommes.

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Russel Banks sur le Web
(site de son éditeur américain Harper Collins)

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