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LACHONS LES CHIENS
Brady Udall

Brady Udall

Paru en France en 1998 aux Editions Albin Michel
Titre original : Letting loose the hounds
Traduction : Michel Lederer

RESUME

Littéralement, on en prend tout de suite plein les dents dès la première nouvelle de Lâchons les chiens, celle qui donne son titre au recueil. On se trouve jeté à demi conscient au bord d'une route, la bouche en sang, les gencives en bouillie, et l'âme en guenille. Dans la peau de Goody Yates qui vient de se faire ôter ses dents de sagesse par un dentiste brutal et pressé. Il est recueilli par un homme providentiel qu'il surnomme Custer à cause de ses boucles blondes et de sa moustache. Custer écoute le désespoir de Goody, ou plutôt le lit, puisque Goody ne peut pas articuler, il exprime par écrit les bribes et les délires d'un esprit et d'un coeur épuisés.

Tout en l'écoutant, Custer lui administre une boîte de calmants. Ces médicaments ont été laissés providentiellement par une ex-petite amie partie en abandonnant Custer, dévasté, mais qui vient d'imaginer une vengeance grâce à ses 17 chiens (d'où le titre "Lâchons les chiens")

Les nouvelles de "Lâchons les chiens" sont autant de petits bouts de vie entre rage, lassitude, ou abandon. Des types autour de trente ans essayent de se remettre du départ de la femme qu'ils aimaient, d'écouter un compagnon... ou tombent désespérément amoureux d'une femme impossible. Tous construisent ou renforcent des liens qui semblent tomber du ciel.  Il y a heureusement, de temps en temps, entre deux traits désespérés, des traits d'humour, ou d'espoir, comme lorsqu'un de ces hommes, entré la nuit dans la nouvelle demeure de son ex-femme et de son fils, repart avec le chien sous le bras.

C.J.

 

A découvrir aussi, le dernier roman de Brady Udall publié chez Albin Michel Le destin miraculeux d'Edgar Mint,et son site officiel :

http://www.edgarmint.com

Destin miraculeux.jpg (7365 octets)

L'AVIS DE JEAN-CHRISTOPHE

Couverture 10.18

Couverture Albin Michel

 

Avec Udall le versant ensoleillé, Franklin la face sombre et Mc Cann orienté vers la pluie, le paysage de la nouvelle américaine se porte bien.Oui, vraiment, Lâchons les chiens de Brady Udall, c'est du bon. On sent que ça a vieilli en fût de Harrison, avec un petit goût de Carver derrière (l'histoire de l'indien qui vient offrir une chèvre à son fils est exemplaire (thème carverien, traitement Harrissonien. Garçon, la même chose !)

C'est incroyable ce que ça se lit vite. Ces chroniques de jeunes types paumés sont très touchantes. Tous ces gens ont un compte à régler avec le passé, et mènent leur existence en titubant au point qu'on ne sait plus trop si ça les fait avancer ou si ça les fait boiter. Ils sont aussi très seuls, les femmes sont les grandes absentes.


Ce qui est toujours aussi impressionnant pour nous français, c'est de constater à quelle vitesse un américain de la classe moyenne peut basculer si vite dans la pauvreté. Et ce qui me surprend toujours autant, c'est le sentiment profond de solitude qui hante nombre d'écrivains américains (Fante, Banks, Brautigan, Udall, Mc Guane...). Leurs personnages trouvent souvent quelqu'un à qui parler mais jamais personne qui les écoute.

J.C.M.

 

Extrait

Le contraire de la solitude

Elle n'aime pas trop l'avouer, mais si Ansie ne vient pas à la maison, c'est parce que je vis en compagnie de trois cinglés. Elle se sent plutôt mal à l'aise en présence de Thorney et d'Iris, mais c'est Hugh qui la rend vraiment nerveuse, lui qui, il y a quelques mois, l'a accueillie sur le pas de la porte, ses couilles ratatinées qui pendaient par l'ouverture de son boxer short. C'est la seule et unique fois où elle est passée.
- Comment peux-tu dormir dans la même maison qu'eux ? m'a-t-elle demandé un jour. Qui te dit que l'un d'entre eux n'est pas un assassin ou un maniaque sexuel ? Un matin, tu risques de te réveiller avec une fourchette plantée dans l'œil ou une main dans ton caleçon.

Au début, pour parler d'eux, elle n'utilisait que la formule "ces trois cinglés", mais j'ai au moins réussi à ce qu'elle finisse par les appeler par leurs noms.