La Revue du Vin















Jim Harrison, chasseur de Goût

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Un article paru dans La revue du Vin de France
(numéro de Décembre 2002/Janvier 2003)
Questions choisies

Dès le début des Aventures d'un vagabond gourmand, vous confessez votre obsession pour la bonne chère et le vin. Comment un américain issu d'un milieu luthérien suédois, né dans une région peu gastronome, en est-il arrivé à cette forme de pensée et de goût ?

L'inconnu m'a toujours attiré. De plus, j'ai pris goût à la bonne viande, aux produits de la chasse, en suivant mon père dans les forêts de mon enfance et en savourant les plats fermiers de ma grand-mère. L'initiation au vin, je la dois à mes rencontres new-yorkaises dans les années 60 et à mes amis français, Guy de la Valdène, un artistocrate normand échoué au fin fond de la Floride et à Gérard Oberlé.   (...) la différence entre les Etats Unis et la France, c'est que là-bas, il est parfois nécesssaire de faire plus de 300 miles pour trouver un bon restaurant, alors que chez vous, il y a toujours un Routier, où l'on est certain de manger copieusement des produits frais et de boire un simple brouilly.

Justement, en tant que scénariste à Hollywood, n'avez vous pas l'impression que le vin est considéré dans votre pays comme un véritable faire-valoir social ?

Je comprends que vous puissiez penser cela, Vin et Argent : Wine and Dollars. Mais les temps, là aussi, changent. Même à Hollywood les restrictions budgétaires sont passées par là. Le milieu est certes, toujours infesté de requins, mais on peut s'y faire de véritables amis et passer un bon moment autour d'une bonne bouteille sans avoir besoin d'en étaler. Avec mon ami Jack Nicholson, nous faisons souvent des bons dîners. Bien qu'il se réserve toujours des bouteilles de grands crus pour frimer auprès des bimbos. En revanche, avec ses copains, il boit en connaisseur de bons flacons sans avoir besoin de sortir des étiquettes prestigieuses. A présent, dans les grandes villes, il est fréquent de touver des wine-bars et des wine shops qui organisent des dégustations de vins de toutes origines, incitant ainsi les consommateurs à être plus regardant sur la qualité. Le Plaisir n'est plus lié à l'étiquette. D'autant que la période des golden boys est maintenant derrière nous.

Le constat que vous portez sur l'alimentation malsaine de vos compatriotes est terrible. Pensez vous que les politiciens et les industriels de votre pays ont une responsabilité dans ce processus de consommation et d'éducation ?

Sans aucun doute. D'ailleurs comme je l'écris dans mon dernier livre, la plupart des erreurs fatales dont pâtit la planète sont dues à des êtres coincés, à des culs pincés, obsédés de perfection. Heureusement, c'est différent chez vous.

Vous qui avouez votre amour du sexe, de la bouffe, et du vin, que pensez-vous des femmes qui aiment et qui achètent du vin ?
Comme je l'écris, vis-à vis des femmes ou du vin, nos perceptions sont limitées, mais c'est ce charme spécifique de l'immmuable qui fait tout le sel de nos existences. Pour moi, le goût est un mystère qui trouve indéniablement sa meilleure expression dans le vin.

En conclusion, Jim, quelle est pour vous la définition d'un mauvais moment ?
Me retrouver piégé devant un verre vide entre deux casse-couilles.

Et celle d'un bon moment ?
Lorsque je suis à Paris, passer la matinée au Musée d'Orsay et la faire suivre d'un bon déjeuner.