|
SUR
LA PISTE DE BIG FOOT
Guy Le Querrec-Jim Harrison - Editions Textuel
|
Photos
et textes de Guy Le Querrec.
Une épopée à humaine exceptionnelle, racontée à deux voix : les
photographies de Guy Le Querrec et les mots de Jim Harrison. Pendant l'hiver 1990, cent
ans après le massacre de Wounded Knee où l'armée américaine assassina le chef sioux
Big Foot et les siens, les cavaliers lakotas partent sur les traces de leurs ancêtres. Le
photographe Guy Le Querrec suit cette chevauchée héroïque par un froid polaire dans le
décor de neige des montagnes du Dakota : "j'a appris deux mots, dit-il froid et
courage". Les mots de Jim Harrison, splendides, illuminent ces quarante photographies
qui ont été exposées pendant Le Festival des Etonnants Voyageurs 2001.
Ces photos allumeront un feu dans
votre esprit, un feu qui durera toujours, si vous êtes un humain digne de ce nom. |
Extrait de
l'introduction de Jim Harrison
La dernière chose à laquelle un américain doté de la moindre conscience
morale désire penser, ce sont les Sioux. Autant oublier qu'on a des coudes, avant de s'en
cogner un, douloureusement, contre une porte. Ca vous arrête net, et cette douleur
bénigne vous rappelle des événements nettement plus pénibles, par exemple le jour où
vous vous êtes fracturés le dos ou le cou.
Les premiers habitants de l'Amérique formaient plus de cinq cents tribus ; nous n'en
avons traîté aucune aussi mal que les Sioux. Jusqu'à une date récente, même des
historient renommés avaient tendance à évoquer le massacre de Wounded Knee comme
"la bataille de Wounded Knee" ce qui revient à parler de la bataille de
Treblinka, de la bataille de Buchenwald ou de notre prpre bataille de Mi Laï. Après la
fin des "Guerres Indiennes", qui se résument pour l'essentiel à une longue
boucherie, il n'y a eu aucun Plan Marshall, mais simplement la création du Bureau des
Affaires Indiennes, sans doute l'administration la plus insidieuse de toute l'histoire de
notre république. Pour passer du général au particulier, je me rappelle avoir vu, il y
a vingt ans, sur la réserve Navajo de Keams Canyon, des enfants infirmes jouer pieds nus
dans la neige, une image incroyable. A peine une semaine plus tard, dans les locaux de la
Société historique du Nebraska, je regardais des photos prises immédiatement après le
massacre de Wounded Knee. Ma vision monoculaire s'est légèrement brouillée (je suis
borgne) quand j'ai découvert la photo d'un ravin rempli d'enfants morts. Il avait fait un
froid terrible et l'on aurait dit que les membres gelés de ces enfants s'étaient
disposés d'eux mêmes pour adresser une supplique maladroite à un ciel muet. Des
massacres comparables pour le nombre des victimes avaient déjà eu lieu à Sand Creek,
dans l'est du Colorado, chez les Cheyennes, et à Bear Creek chez les Shoshones, quand
l'un de nos soldats avait décrit la tuerie comme "une partie de plaisir". Il
est sans doute difficile de connaitre la véritable histoire de notre propre pays, mais la
plupart de mes concitoyens ne semblent pas trop s'en inquiéter. Nos manuels scolaires ne
reconnaissent jamais clairement que nous sommes descendus de nos bateaux pour anéantir
une civilisation extrêmement variée, dont les cinq cents incarnations possédaient un
art et une littérature orale d'un raffinement admirable. Nos armes ont inclus revolvers
et carabines, famines et maladies.
La raison de nos
conquêtes avait pour nom : cupidité. |